Toujours avec un peu de retard mais toujours autant de motivation voici l'article sur notre 3ème semaine de stage.
Noura était en NICU (c'est à dire la néonat) Sophie s'est retrouvée en PICU (les soins intensifs pédiatriques) et Audrey a pu se rendre aux urgences. Sophie et Noura voulaient rajouter quelques informations par rapport à leur semaine passée aux urgences.
Sophie + Noura (suite urgences):
Nous avons effectué notre deuxième semaine de stage aux urgences. Ce fut
une semaine riche en émotions et en partages. Nous sommes contentes de l'avoir
passées ensemble car nous avons vraiment pu nous soutenir mutuellement et
reparler de certains moments particulièrement forts. Parmi les instants qui ont
marqué cette semaine nous avons reçu une femme enceinte qui est arrivée en
ayant déjà commencé le travail dans l'ambulance, résultat : une petite
fille est née par le siège sur un brancard en fer au milieu des urgences. Nous
avons eu plusieurs cas étranges de troubles psychiatriques qui se sont présentés.
De jeunes personnes arrivant avec des mouvements et hurlement incontrôlés ou au
contraire complètement paralysées, nous avons eu comme explication que ceci était
sûrement un trouble de la conversion, un trouble psychiatrique inconscient
survenant chez les jeunes et étant très souvent un "appel au
secours". Autant vous dire que c'était très impressionnant à voir et les
proches nous ont particulièrement touchés tant ils s'impliquaient dans les
soins tout en étant si impuissants. À la fin de cette semaine, nous avons
assisté l'équipe durant la réanimation cardiaque d'un enfant de 5 mois qui n'a
malheureusement pas survécu. Nous n'entrerons pas dans les détails mais nous
avons particulièrement été choquées de cet épisode et n'avons pas reçu de
soutien de la part de l'équipe. Malheureusement pour les soignants, le décès
d'un enfant doit certainement être courant dans un service tel que les urgences.
D'autant plus qu'ici, les népalais n'ont pas du tout la même approche que nous
concernant la mort. C'est pourquoi, nous ne jugeons pas les soignants mais nous
exprimons simplement notre ressenti. Cette semaine nous a vraiment montré
l'importance de partager et de mettre des mots sur ce que nous vivons en stage.
Si l'équipe n'est pas toujours disponible, heureusement il y a toujours
l'oreille d'une amie ou d'une maman pour se confier...
Audrey:
Je pense que Sophie vous a déjà bien expliqué le fonctionnement des urgences je ne vais donc pas écrire une tartine sur le sujet! Mais c'est vrai que je garde un souvenir assez marquant de cette semaine. J'y ai vu des choses qui relèvent vraiment de l'urgence: accident de la route, fractures, brûlure aux 2ème et 3ème degrés, etc. et grâce à l'équipe absolument géniale j'ai pu être au coeur de cette action! Il y avait comme partout, des journées chargées où trois patients devaient se partager un même lit et d'autres où il n'y avait strictement rien à faire et où les proches des quelques patients présents dormaient sur les autres lits!
Au-delà du stress de l'urgence et des situations difficiles à vivre, il y avait juste des moments qui me donnaient l'impression d'être dans un autre monde! Par exemple, une jeune femme enceinte venait pour une consultation gynécologique en urgences suite à des saignements. Nous l'installons dans la petite salle prévue pour ce genre de consultations, le médecin enfile ces gants stériles et prend un spéculum pour l'examen physique. En plein milieu de l'examen, la femme de ménage des urgences entre dans la petite salle s'appuie sur sa panosse et regarde avec nous le déroulement de l'examen!
Ou alors lorsque deux accidentés de la route arrivent aux urgences tout les proches de tout les patients se rassemblent et tout le monde vient voir ce qui se passe!
Bref c'est ce genre de petits moments qui me faisaient sourire intérieurement car je ne pouvais pas m'empêcher de comparer avec la Suisse et je me disais que ne pourrait jamais arriver chez nous!
Ma semaine a été écourtée par quelques jours de fièvre et de maux de tête mais j'y retourne dans deux semaines et je me réjouis vraiment de ce que je vais pouvoir y voir et y faire!
Noura:
Pour ma 3ème semaine de stage au Dhulikhel Hospital je suis dans le département de médecine pédiatrique mais dans le service des soins intensifs de néonat. J'adore les bébés et aime tout particulièrement travailler avec les tout petits, les nouveaux-nés. Cependant, j'appréhendais ma semaine, je ne savais pas quel type de problématique aurait les bébés en néonat au Népal. Je me suis dit: "lance toi et tu verras bien!"
C'est ce que j'ai fait, de toute façon je n'avais pas tellement le choix j'ai envie de dire...
C'est le premier service dans lequel on me voit arriver car c'est une petite chambre avec 10 petits lits et seulement deux infirmières. Chaque jours, je choisissais une des deux infirmières et l'assistait pour la journée. Le premier jour, j'ai bien observé leurs pratiques (donner le bain, donner à manger, les médicaments, etc.) afin de bien les assimiler. Car j'avais compris que dans ce service j'allais être utile et pouvoir aider. Les bébés étaient pour la plupart tout, tout, tout, tout petits. Déjà qu'au Népal ils sont déjà plus petits, de par la taille de leurs parents, mais en plus ils sont pour la majorité prématurés.
* Anecdote: les lits des bébés ont une lumière chauffante placée bien au-dessus de la tête de tout le monde, mais parfaitement à la hauteur de la mienne afin que je me la tape très régulièrement! C'est quelque chose qui les faisaient beaucoup rire en tout cas! *
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| Préparation du lait |
Certains des bébés n'étaient pas assez matures et devaient être sous surveillance, d'autres avaient des problèmes respiratoires, cardiaques et bien d'autres choses encore. Ce sont des enfants très fragiles, il faut donc toujours veiller à ce qu'ils soient bien. Je prenais toujours bien connaissance du dossier avant de prendre des responsabilités.
J'ai donné des bains, je leur ai donné du lait, je l'ai ai calmé lorsqu'ils pleuraient. Car les parents, à part regarder leur bébé par la vitre, ils ne peuvent pas avoir de contact avec leur enfant. J'ai aussi averti le personnel soignant quand j'ai constaté qu'un petit bout n'allait pas bien; malheureusement une fois ça n'a pas suffit! J'ai vécu deux décès cette semaine-là. Ca n'a pas été facile à gérer, de plus que la barrière de la langue ne me permettait pas toujours de comprendre le comment du pourquoi! Certes, parfois, certains décèdent. Mais heureusement, bien souvent les enfants peuvent être sauvés!
Au final, une semaine pleine d'émotions mais surtout une très belle expérience!!!
Sophie:
Après notre semaine aux urgences, j’ai passé ma semaine dans l’unité des
soins intensifs pédiatrique. C’est une très petite unité qui compte seulement
deux lits et une seule infirmière y travaille. Il y a des enfants âgés de 0 à
18 ans. Durant cette semaine, je me suis occupée de deux enfants (une fille de
6 mois et un petit garçon d’un mois), tous deux souffraient d’infection au système
respiratoire. Le garçon était intubé et donc endormi, c’était très
impressionnant de voir ce petit corps inerte relié à des dizaines de tuyaux.
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| Sophie prête pour une journée en NICU |
J’ai eu la chance d’accompagner ces deux enfants dans une évolution plutôt
positive de leur état de santé. La petite a été transférée dans le service de médecine
pour des suites de soins et j’ai assisté à l’extubation et le réveil du petit
garçon, qui se remet gentiment. Lorsqu’il était encore intubé, ses parents ne
pouvaient pas être à ses côtés, ils passaient leurs journées à l’observer derrière
la vitre. C’était dur de voir un si petit bout, dans un si grand lit, sans
aucun contact avec ses parents. Au début, la maman m’observait lorsque j’étais
auprès de son fils, elle avait très peu d’expression dans le visage. Petit à
petit, elle m’adressait un sourire et des petits signes de la main. Ma semaine
terminée, il allait être transféré en médecine lui aussi. Malheureusement il a
dû retourner aux soins intensifs. Je passe régulièrement le voir derrière la
vitre, mon petit Kamal qui se bat comme un chef, accompagné de ses parents qui
m’adressent à chaque fois un magnifique sourire.